Critique de Suzanne B.

Synthèse

Suzanne B.- 60 ans – master ingénieur de la formation, conseillère Fleur de Bach
Sensibilité littéraire : Éclectique, classique, poésie

VOLUMES I ET II*  ♥♥♥♥ 

Épisode 1  ♥♥♥♥ 

Épisode 2 ♥♥♥ 

Épisode 3 ♥♥♥ 

Épisode 4 ♥♥♥♥ 

* Le test 1 s’est limité aux deux 1ers volumes, chaque volume contient 2 épisodes

Premier épisode

♥♥♥♥

C’est magnifiquement écrit, simple, fluide, direct, essentiel, où les perceptions tant visuelles qu’émotionnelles s’imposent immédiatement et clairement. Les personnages sont tous attachants, avec une vraie profondeur suggérée, des luttes intérieures qui révèlent leur complexité et leur beauté d’âme. J’adore tout particulièrement la trisaïeule, merveilleux pilier de la communauté, pleine de sagesse dévouée et d’humour.
Les thèmes du livre qui s’annoncent sur ce premier épisode en forme de prologue sont encore nébuleux, ils baignent dans le brouillard entourant le village qui s’épaissit de page en page, accroissant l’intensité de l’intrigue de page en page, et c’est précisément ce qui fait son pouvoir d’attraction exceptionnel. Le style de l’auteure adopte une ligne claire, sans aucun superflu, qui est assurément très travaillé parce que le phrasé est mélodieux, la prose poétique, transmettant un haut degré de sensibilité et de délicatesse.
C’est pourquoi la scène d’amour cru n’a rien de pornographique à mes yeux, parce qu’il n’y a rien de bas dans ce qui s’y passe. Son insolence autant que son vocabulaire grossier restent ludiques, et les ébats des amants témoignent de leur désir de communion qui les plonge finalement dans un amour encore plus vrai et plus profond. Tout en étant touchée par sa force et sa qualité, j’ai néanmoins éprouvé que cette scène était trop longue, non pas en soi, mais parce qu’elle m’a contrainte à me mettre en attente de l’intrigue principale avec le petit Thomas que j’avais hâte de retrouver.

Deuxième épisode

♥♥♥

C’est toujours aussi bien écrit, mais cette fois j’ai buté sur le personnage d’Ungern, « l’ange déchu ». On s’enfonce avec lui dans la noirceur de l’humanité jusqu’à un niveau presque insoutenable, et j’en ai éprouvé un véritable malaise. La question qui s’est alors posée à moi est pourquoi je lis, et la réponse est pour le plaisir, pour m’aventurer dans l’imaginaire aussi bien que pour apprendre quelque chose de nouveau, mais certainement pas pour me faire souffrir ou me démoraliser. Ça a donc été un moment de lecture éprouvant, même si je comprends bien l’intention de l’auteure qui à travers Ungern sonne l’alarme d’un enfer possible pour l’humanité si elle continue de s’enfoncer dans la voie de perdition qui est la sienne aujourd’hui.
Sinon j’aime beaucoup l’amitié qui se noue entre Thomas et Carlos, la façon dont il fait connaissance avec Mongo et le Mongonastère, et le personnage du colosse Zabir chargé de leur instruction qui exprime une profonde sagesse à hauteur d’enfant. Lorsqu’on entame la première description et analyse politique de la Communication, on entrevoit la véritable matière du livre qui révèle l’activisme de l’auteure. Et tout d’un coup, à l’intérieur même d’une pure fiction, on est sensibilisé à des problématiques majeures de notre monde actuel, ce qui produit un effet de surprise déroutant et redouble l’intérêt du récit de savoir où tout cela peut bien mener.

Troisième épisode

♥♥♥

Avec la révélation de Mongo en tant qu’Instrument, se déploie toute la problématique politique de la Communication.
L’abrutissement de masse généré par la capture d’attention addictive virulente, l’ambivalence de la « neutralité » de l’Instrument magnifique qui offre le pire comme le meilleur, et la référence aux croquants comme sommet d’une manipulation généralisée font ressortir d’une manière frappante l’emprise envahissante du pouvoir de la Communication dans notre existence quotidienne.
Ce qui me surprend surtout dans cet épisode, c’est comment l’auteure utilise un contexte fantastique pour mener une analyse rigoureuse des rouages actuels de la Communication qu’elle pousse à leur extrême aboutissement, nous offrant ainsi un regard visionnaire très pertinent et très réaliste des bénéfices comme des fléaux que nous pouvons en récolter en fonction des choix de notre comportement collectif. Et le livre change ici à nouveau de catégorie pour adopter une forme d’expression que je n’ai encore jamais lue ailleurs. C’est comme s’il parvenait à faire fusionner le fantastique avec la réalité, où le fantastique rejoint notre réalité la plus concrète qui en retour retrouve sa part de fantastique, comme s’il nous faisait passer d’un état de résignation impuissante à la fatalité à un réenchantement de notre capacité créatrice à agir sur notre destinée collective pour le meilleur.

Quatrième épisode

♥♥♥♥

Épisode massif, dense, fourmillant d’éclairages déterminants et d’idées neuves, véritable point d’orgue du livre qui a fini par me conquérir totalement.
C’est avec lui que les pièces du puzzle semées dans les épisodes précédents se rassemblent enfin, toutes les clés de lecture sont révélées qui rétrospectivement éclairent les changements de thèmes et de genres littéraires en leur donnant toute leur raison d’être. Et ce qui fait sens et unifie le livre en un tout cohérent, c’est de se retrouver soudain embarqué dans un véritable manifeste politique qui tout en conservant le ton de l’aventure humaine pleine de péripéties, déploie un constat des lieux de l’état catastrophique du monde d’une clarté, d’une justesse et d’une pertinence impressionnantes, pour ensuite sur la base de ce constat, proposer des réponses salutaires appropriées qui sont là aussi d’une incroyable pertinence et crédibilité.

J’ai un passé d’activisme politique pour avoir fait partie de l’équipe qui a mené Catherine Trautmann à la mairie de Strasbourg. Et pour moi, le véritable choc du livre est dans ce manifeste politique tellement novateur qui montre à quel point les politiques gouvernementales de tous bords sont déconnectées des problématiques du véritable pouvoir qui règne sur notre monde et devant lequel elles demeurent par conséquent totalement impuissantes.
Mais là, je découvre des réponses révolutionnaires absolument inédites que je n’ai encore jamais entendues nulle part, des réponses limpides, imparables sur le papier, d’une puissante assise analytique qui les rendent terriblement convaincantes et enthousiasmantes. Nul doute qu’elles ont réveillé ma fibre militante, ce qui se traduit par un désir de faire connaître les idées politiques du livre, de les propager en proposant à toute personne concernée par le devenir de notre monde en grande souffrance de faire l’expérience de la lecture du livre tout entier.
Parce qu’autant il est impossible de se contenter de diffuser un résumé de ces idées sans perdre leur potentiel d’action et de contagion, autant ce dernier épisode rend parfaitement clair la nécessité de passer par l’arme du divertissement comme l’utilise l’auteure. Parce que face au moins pire des mondes possibles auquel les médias dominants nous imposent de nous résigner faute d’une alternative crédible, tout ce dont nous avons besoin, c’est que ces idées révolutionnaires qui conduisent à une issue véritable soient transmises au plus grand nombre possible de consciences jusqu’à atteindre cette masse critique qui enclenchera la révolution en nous redonnant la foi en un horizon ouvert prometteur d’un devenir meilleur pour toute l’humanité.