La mort lumineuse

Je veux te rappeler la vision la plus profonde de la mort qui appartient à la mémoire originelle de ta vraie personne et qui est la seule vraie en définitive, la seule qui demeure à la toute fin.
L’Appel de Mongo Volume IV

Tout ce que l’auteure Sarasvati exprime sur la mort dans L’Appel de Mongo est d’ordre factuel et non dogmatique, provenant de son expérience directe vécue lors de sa NDE (Near Death Experience détaillée dans sa biographie ICI).

Parce que cette expérience est à l’origine du livre, le rapport à la mort en constitue l’alpha et l’oméga, le commencement et l’aboutissement. Tout comme le livre reconnaît que notre société de la croissance infinie repose sur le refoulement de la réalité de la mort qui est la racine qui alimente tous nos maux, se constituant alors comme un immense essai pour annihiler le mal à sa racine en nous conduisant à nous réconcilier avec la réalité de la mort.

La mort dans le livre (extrait)

Gunj : vieux sage alchimiste pleinement réalisé qui symbolise le plus haut idéal d’accomplissement de l’être humain.
Thomas : son élève, jeune adulte au don de Danseur.
Charge coupable : la pierre que chacun porte avec son poids de culpabilité, mais aussi en tant qu’instance de séparation qui coupe en deux notre être véritable en perpétuant la dualité.
Fausse personne et vraie personne : l’ego de surface entretenu par un agrégat de mémoire ressassante et notre être profond où réside notre mémoire originelle.
Cœur ouvert et cœur fermé : « Tout vient du cœur parce que la conscience réside dans le cœur, parce que la conscience est le fait d’un cœur ouvert, tandis que l’inconscience est le fait d’un cœur fermé. »

― Ton ressenti de la réalité de la mort est juste. La façon dont elle s’est manifestée à toi t’appartient cependant en propre et varie considérablement d’une personne à l’autre… Nombreuses sont les évocations de la mort, aussi nombreuses qu’il y a d’espaces de référence où le ressenti particulier de chacun garde sa pertinence. Que l’on parte d’un point de vue grossier où les méchants sont punis et les gentils récompensés, d’un point de vue intermédiaire où la conscience rétablit constamment l’équilibre en nous faisant à chaque fois basculer de l’autre côté du miroir pour affronter et réparer ce que nous y avons refoulé, ou du point de vue ultime de notre vraie personne qui traverse la vie sans être affectée par la naissance et la mort, tout émane de notre intuition secrète de la loi d’harmonie du cœur de l’univers d’une parfaite justice à laquelle nous obéissons tous du fond du cœur.

Un autre frisson parcourut Thomas tandis que lui revenait l’écho de la communication mystérieuse qu’il avait reçue du Danseur invisible qu’il portait en lui : Chacun obéissant du fond du cœur à la loi du cœur d’une parfaite équité, d’une simple et même justice pour tous, chacun est immanquablement assuré de recevoir à son heure les fruits des actes qu’il a semés et cultivés. Mais sous l’autorité du vieux maître qui lui donnait l’impression troublante de se relier au Danseur invisible pour s’exprimer à travers lui, cette vérité s’ouvrait soudain sur une profondeur abyssale :

― Je veux te rappeler la vision la plus profonde de la mort qui appartient à la mémoire originelle de ta vraie personne et qui est la seule vraie en définitive, la seule qui demeure à la toute fin. Là aucune forme de châtiment n’y a sa place, même pour le criminel le plus endurci qui aura infligé les pires souffrances de son vivant. Car s’il n’échappera pas pour autant à la juste rétribution de ses crimes, dans la vision la plus profonde il se précipite toujours de lui-même dans l’enfer de ses crimes en répondant à un libre élan du cœur, dans la vision la plus profonde il réclame toujours délibérément de payer tout le prix de ses crimes en renouant avec son bon cœur fondamental qui veut réparer à toutes forces les souffrances qu’il a infligées sous l’aveuglement de son cœur fermé…

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― Puis il oublie, intervint Thomas, il oublie sa mission de cœur et sa nouvelle naissance l’enferme dans un cauchemar dont il se croit la victime injuste. Son désir de réparation devient alors inconscient en prenant la forme d’une autopunition. Puis il va à nouveau se rebeller contre cette vie de cauchemar absurde qu’il a héritée, ce qui justifiera à ses yeux les prochains crimes qu’il commettra et les nouvelles souffrances qu’il infligera encore et encore…

― Jusqu’au moment où il sera assez mûr pour assumer la responsabilité du sort qui lui échoit, ce qui correspond au tout premier réveil de la mémoire originelle de sa vraie personne. Et à ce moment-là seulement le cercle infernal sera brisé en l’engageant sur la voie de la réparation consciente.

 Gunj leva les sourcils pour fixer intensément son jeune protégé, établissant avec lui une connivence muette. Ensuite il clarifia :

― Ce qui se reconstitue en passant d’une vie à l’autre est le poids de notre charge coupable qui n’a pas été consumé en conscience. C’est à partir de cette instance de séparation renfermant toute notre peur qu’à chaque nouvelle naissance va s’édifier une nouvelle fausse personne qui s’identifiera à son nouveau nom, à son nouveau corps, et plus encore à son nouvel agrégat de mémoire qu’elle va accumuler au cours du temps pour la renforcer toujours plus. Lorsque le corps meurt, tout ce qui a été identifié au corps meurt avec lui. Chaque fausse personne est donc mortelle puisqu’elle n’a qu’une seule existence qui ne dure qu’aussi longtemps que dure son identification au corps. Avec la mort du corps, l’identification au nom et à la forme est rompue, ce qui entraîne leur désagrégation, tout comme se désagrège définitivement l’agrégat de mémoire accumulé par la fausse personne qui a forgé toute son identité, et donc aussi bien sa seule et unique existence… Le passage par la mort nous ramène tous à la source de notre vraie personne en désagrégeant notre fausse personne. Son extinction résorbe provisoirement notre charge coupable qui se retire dans un état dormant, tandis que la fermeture du cœur se dissout. Là nous renouons avec la mémoire originelle de notre cœur immensément ouvert qui nous rappelle l’illusion ultime de la mort et de la souffrance qui ne peuvent en rien affecter notre être véritable. Et c’est dans cette reconnaissance de notre invulnérabilité fondamentale que nous répondons à l’élan spontané de notre bon cœur fondamental qui peut aller jusqu’à nous plonger en enfer pour réparer toutes les fautes commises à l’œuvre de notre cœur fermé.

― Ça se produit vraiment pour nous tous ?

― Oui. La seule différence est que plus il y a de charge d’inconscience en nous, plus cette reconnaissance est fugitive. De la même façon que plus la charge coupable qui se reconstitue à notre naissance est lourde, plus notre vraie personne se tient en retrait, plus elle est endormie et plus l’oubli est profond.

Le silence intérieur s’imposait toujours plus à Thomas tandis que la résonance de sa mémoire originelle continuait de se répandre et de s’amplifier, le rendant pareil à une membrane d’écoute infiniment sensible. Quand Gunj reprit :

― Toutes les missions de cœur qui nous reconduisent dans le monde ne relèvent pas d’une faute personnelle à réparer. Elles peuvent aussi émaner d’un pur élan d’amour et de joie créatrice aspirant à engendrer un bienfait nouveau pour l’humanité. Mais parmi toutes ces missions généreuses, aucune ne surpasse celle qui porte le vœu suprême d’accomplir la grande réparation universelle. Il n’est pas de vœu plus précieux ni plus rarissime qui puisse fleurir dans un cœur humain, et plus rarissimes encore sont ceux qui l’ont prononcé dans le secret de leur cœur où il ne pourra plus les lâcher tant qu’il ne sera pas exaucé. C’est à eux qu’est réservé le nectar du remède universel qu’ils sont les seuls à pouvoir conquérir pour être contenu dans le vœu suprême lui-même.

< L’Appel de Mongo vol IV  p224-227 >