(CC) World Economic Forum – Montage sur photo de Andy Mettler
On le soupçonnait depuis un moment de s’enrichir sur le dos de sa Fondation caritative avec son soutien à Monsanto et Big Pharma, un rapport de Global Justice Now le révèle enfin au grand jour.
Bill Gates s’inscrit dans la lignée de son funeste prédécesseur J.D. Rockefeller en tant que champion des « bienfaiteurs » de l’humanité. Rappelons que Rockefeller, antisémite notoire pour avoir financé une Fondation sur l’eugénisme dans l’Allemagne nazie, a été un des plus grands soutiens d’Hitler en lui fournissant durant tout le conflit un tiers du pétrole qui lui manquait pour pouvoir faire la guerre. Rappelons qu’il a été de loin le plus grand profiteur du crime de la Seconde Guerre mondiale tant elle lui aura permis de démultiplier sa fortune, mais que malgré cela l’empire Rockefeller (J.D. meurt en 1937) n’a jamais été inquiété pour sa participation criante dans le carnage qui a ravagé le monde. Il a échappé à la justice des hommes, entre autres, grâce à ses Fondations philanthropiques lui permettant de se racheter une bonne conscience à moindre frais avec le don d’un terrain pour l’édification de l’ONU et la contribution à la création de l’OMS par un financement massif. Il est devenu ainsi tout à la fois le plus grand criminel de guerre jamais condamné et le plus grand « bienfaiteur » de l’humanité en quantité de dollars alloués (quantité qui reste dérisoire par rapport à l’immense richesse qu’il a acquise grâce à la guerre).
Il illustre de la manière la plus extrême comment l’élite richissime vole d’une main le pain de l’humanité par l’exploitation de sa misère sous toutes ses formes, pour de l’autre main lui en redistribuer quelques miettes en grand seigneur. A l’image de la pratique des Indulgences du Moyen-Âge qui permettait de s’acheter un ticket garantissant sa place au paradis tout en continuant de perpétrer les crimes les plus odieux, l’élite pratique elle aussi le blanchiment de mauvaise conscience par ses nombreuses Fondations et autres œuvres de bienfaisance. Elles réussissent à la convaincre de sa contribution bénéfique à l’humanité sans jamais avoir à remettre en question son système d’exploitation à l’origine de l’immense misère humaine aussi bien que de son immense fortune effarante.
On plaidera d’abord en faveur de Bill Gates qu’à la différence de Rockefeller, lui n’a pas de sang sur les mains et que sa fortune colossale n’est pas le fruit d’une exploitation criminelle mais bien d’un service fourni à l’humanité qu’elle achète en masse pour son utilité manifeste. On pourrait bien sûr critiquer son aspect monopolistique et autres manœuvres qui cherchent à briser la concurrence, mais là n’est pas notre propos. Pour l’essentiel, on se doit de reconnaître que Bill Gates est parti de rien pour bâtir son empire, qu’il le doit essentiellement à son intelligence et à sa créativité, et que tout du long il n’a pas eu recours au crime pour s’imposer, ce qui à ce stade de puissance acquise est exceptionnel et fait que sa réussite demeure en soi digne d’admiration.
On était tous partis pour l’admirer d’autant plus fort lorsqu’il a créé sa Fondation humanitaire dotée aujourd’hui de 43,5 milliards $ qui fait d’elle la plus grande organisation caritative du monde. Puis à l’écouter avec sa bonne tête de premier de la classe, on peut aussi difficilement douter de sa sincérité à vouloir agir pour le bien de l’humanité. Mais là où ça a sérieusement commencé à clocher, c’est quand sa Fondation a fait de Monsanto son soutien et recours prioritaires dans le cadre de son aide au développement agricole, tout comme elle a fait de quelques grandes firmes pharmaceutiques, autrement dit de Big Pharma, son soutien et recours prioritaires dans le cadre de son aide au développement de la santé.
Comment un homme aussi intelligent que lui, avec sa Fondation dotée des meilleurs cabinets d’expertise, peut-il ignorer la dangerosité potentielle des OGM promus par Monsanto qui reste une des entreprises au passé le plus criminel du monde ? Comment peut-il soutenir l’expansion planétaire des OGM nécessitant engrais chimiques et pesticides qui condamnent les nations et les agriculteurs qui les utilisent à une perpétuelle dépendance aux fournisseurs de graines et d’intrants extérieurs ? Pourquoi, alors que l’ONU elle-même a fini par reconnaître que l’agroécologie est plus performante que l’agriculture industrielle avec l’énorme avantage de rendre aux paysans l’indépendance et le contrôle sur leur production qui reste soutenable et pérenne par excellence, pourquoi sa Fondation ne finance-t-elle rien dans cette direction pourtant si prometteuse ? Pourquoi, à côté de l’option des OGM, ne propose-t-elle pas également cette option ne serait-ce qu’à titre expérimental, pour déterminer laquelle de ces deux voies se révélerait au final la plus efficace et salutaire ?
Et la même réflexion peut être reprise à l’identique concernant le domaine de la santé. Pourquoi recourir en masse aux vaccins et aux trithérapies extrêmement coûteuses de Big Pharma pour soigner le sida, quand d’autres thérapies alternatives existent qui ont fait la preuve d’une efficacité équivalente si pas supérieure pour un coût nettement plus faible ? Pourquoi donner majoritairement des milliards de dollars à Monsanto et Big Pharma pour soigner les maux de l’humanité à grand renfort d’une haute technologie dispendieuse et inassimilable par les pays pauvres, quand il existe d’autres voies prometteuses à une échelle plus humaine impliquant la participation locale active des assistés qui avec les mêmes milliards pourraient faire très probablement dix fois plus et dix fois mieux ?
La première réponse est que Bill Gates est un ardent défenseur du capitalisme et de l’impérialisme marchand qui à ses yeux reste le modèle le plus approprié pour le bien de l’humanité. Sa philosophie rejoint le paternalisme missionnaire de l’élite qui se résume à : « D’abord devenez milliardaire et ensuite utilisez vos milliards pour faire le bien à l’humanité selon votre bon vouloir ».
La deuxième réponse est qu’il ne peut pas promouvoir les voies alternatives que nous avons citées parce qu’elles menacent la position hégémonique de l’élite régnante. Le problème avec l’agroécologie et les médecines naturelles qui font usage des produits locaux bon marché avec succès (comme le prouve notamment l’association médecins aux pieds nus), c’est qu’elles rendent les populations autochtones autonomes et indépendantes de besoins extérieurs. Le problème si on leur permet de se développer, c’est qu’elles vont réduire les parts de marché des multinationales qui perdront peu à peu leur emprise sur ces populations. Le problème, c’est que les peuples vont trouver par là le moyen de se rassembler et de s’organiser pour s’émanciper du diktat de l’élite régnante, s’émanciper de l’empire des multinationales comme de l’empire financier. Le problème, c’est qu’ils finiront par quitter leur statut d’assistés passifs perpétuels pour prendre leur destin en main, réalisant tout leur intérêt de cultiver leur souveraineté par l’auto-suffisance et l’auto-gestion, ce qui inclue le développement d’un Internet libre grâce au monde des logiciels libres au service du bien commun qui de l’aveu même de Bill Gates est le plus grand danger qui menace la suprématie de Microsoft.
La troisième réponse est d’ordre purement commercial : ou comment sa Fondation, tout en étant la plus généreuse du monde, lui permet en même temps de s’enrichir toujours plus. Dans une démarche commerciale d’envergure, on vous propose d’abord des échantillons gratuits et/ou un essai gratuit sans engagement. Si vous acceptez, vous vous retrouvez si bien investi dans votre essai gratuit que vous êtes ensuite fortement tenté de vous engager avec la formule payante. La Fondation Bill Gates correspond à la phase échantillons et essais gratuits des multinationales. Il s’agit pour Monsanto et Big Pharma d’imposer et de répandre leurs produits dans le monde entier jusqu’à ce qu’on ne soit plus en mesure de s’en passer, moment fatidique où la formule payante sera alors appelée à prendre le relais. Le rapport révèle les importants placements en action de Bill Gates dans les multinationales que sa Fondation finance, additionnés à son soutien à des projets qui bénéficient aux fabricants d’OGM, et toute une pratique d’évasion fiscale opérée sous couvert de l’organisation caritative. Au final, le tiroir caisse de sa « générosité » se révèle extrêmement lucratif puisqu’il en sort encore plus riche.
Mais bien plus grave que la poursuite de son enrichissement sans fin sont les choix de sa Fondation qui favorisent l’élitisme en soutenant les systèmes de santé et d’éducation privés, et qui sacrifient la justice sociale sur l’autel du progrès technocratique, avec pour conséquence d’affaiblir les mouvements pour la souveraineté alimentaire en les plaçant dans les griffes avides des multinationales. Il se passe que la puissance d’action de sa Fondation est si dominante qu’elle influence et oriente les politiques sanitaires et agricoles mondiales dans sa direction. D’une part les pays en demande d’aide vont privilégier l’option de Gates pour espérer recevoir sa manne considérable, et d’autre part les ONG vont être incitées à suivre l’autoroute ouverte par sa Fondation pour recevoir son financement mais aussi bénéficier des commodités de sa solide infrastructure de fonctionnement.
On aboutit ainsi à une véritable dictature de la bienfaisance qui s’impose au mépris de toute concertation sur la meilleure manière de procéder, une dictature qui sert d’abord les intérêts des multinationales au détriment des pays pauvres qui sont maintenus dans un état de domination et de dépendance au donateur par une assistance perpétuelle. Il s’agit bien d’une dictature parce que la forme d’aide imposée massivement par Bill Gates et ses multinationales a pour effet d’étouffer les autres formes de développement alternatif en émergence, cela alors même que les expertises internationales indépendantes les reconnaissent comme les plus prometteuses pour éradiquer la misère en donnant aux paysans les moyens de cultiver leur auto-suffisance, et donc de s’émanciper de la tutelle coercitive des riches donateurs.
La Fondation Bill Gates est un cadeau empoisonné offert à l’humanité, peut-être le plus insidieux qu’elle ait jamais reçu. Tout comme les œuvres caritatives des grands capitaines d’industrie du XIXème siècle, elle a pour vocation de soulager les misères les plus intolérables engendrées par un système économique impitoyable qui a fait leur fortune mais ne doit en aucune façon être remis en cause. Elle sert donc principalement à le pérenniser en le rendant aussi tolérable que possible par la réduction de la misère la plus criante, tout en veillant à maintenir les peuples exploités sous la tutelle paternaliste perpétuelle de leurs « bienfaiteurs ». Le but inavoué est de garder le contrôle sur ces peuples en faisant en sorte qu’ils n’accèdent jamais à leur autonomie et à leur émancipation qui signeraient la fin des privilèges exorbitants de l’élite régnante, et accessoirement bien sûr, la fin de l’augmentation incessante de la fortune incommensurable de Bill Gates.
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Voir aussi notre vidéo L’agroforesterie tropicale ou le miracle de l’abondance pour tous sans effort qui révèle, entre autres, la guerre secrète de Bill Gates contre l’agroécologie.
Lire l’article d’Oscar Rickett du 21 janvier 2016 révélant les conclusions de l’enquête, traduit de l’anglais : La Fondation Bill et Melinda Gates aide-t-elle les multinationales plus que les pauvres ?
A vomir, berrrk!